L’amante Immobile paraît en avril 2019
chez BOD
Entretien avec Michel ROUVEURE
La place
du cinéma dans ce roman
L’amante
immobile est un roman foisonnant
qui multiplie les clins
d’œil au cinéma. (voir en fin d'article la filmographie du roman)
Pourquoi cette référence ?
Paul,
le personnage au centre du livre, est un cinéphile compulsif. De ce fait, le
cinéma est toujours dans son esprit comme une toile de fond à ses actes. Pour
faire écho à sa passion, j’ai donc choisi une construction du roman calquée sur
les séquences d’un film. Au début, une succession de scènes
qui semblent sans lien : une rencontre dans un café, un appartement
bourgeois dans un étonnant immeuble, un antiquaire qui se voit proposer un
tableau impressionniste…
Le présent, les souvenirs, les situations graves ou facétieuses vont
s’imbriquer peu à peu pour former une intrigue qui va plonger le lecteur dans
le doute et le soumettre à une inquiétante interprétation des faits.
Un passage de votre roman célèbre Jean-Pierre Marielle alors que l’on apprend
sa disparition…
Jean-Pierre Marielle est l’acteur fétiche du héros
du roman. Ce dernier en a la stature, la générosité et parfois la truculence au point de
se sentir « mariellisable ».
Il le cite mot à mot, le mime parfois et lui imagine même une place au Panthéon !
Marielle était un immense acteur, ses
compositions s’inscrivent dans notre patrimoine commun, alors pourquoi pas ?
Les thèmes du roman
Il s’agit d’une mésaventure à rebondissements qui ne peut se réduire au seul
récit d’une rédemption. Vous croisez les thèmes de la manipulation, de la confusion,
de la signification des rêves, de la recherche de l’amour…
La
rencontre est un élément majeur du livre avec toutes ses conséquences :
l’amour ou l’amitié possibles, l’émerveillement mais aussi le doute,
l’interrogation sur le hasard ou la préméditation… Elle va concerner tous les
personnages du roman. Une rencontre qui peut être la porte de la confusion,
autre thème du roman et source d’intrigue. Intrigue d’autant plus prégnante,
que le lecteur a du mal à déterminer qui se trouve réellement dans la confusion
et l’illusion.
En effet, vous
entretenez le doute jusqu’à la fin ! Les rencontres et découvertes sont
effectivement présentes tout au long de votre livre. Certainement parce que c’est
un roman « voyageur » qui nous transporte du Vieux-Lyon aux rivières
de l’Ardèche, des quartiers d’Oran à un entrepôt du Sénégal, du Languedoc aux
Pyrénées Orientales…
Les
passages du roman évoquant des contrées, proches ou lointaines, révèlent des faits insolites,
des personnalités peu banales, en résonnance avec le fil de l’histoire ou
porteurs d’indices. Passé et présent, ailleurs et ici, rêve et réalité; des notions qui s’emmêlent, se déforment...Une lente mise en abyme de la confusion.
La fiction côtoie le
témoignage
L’amante
immobile nous lance à la poursuite d’un tableau, nous conte des histoires insolites, mais nous
livre également des témoignages. Ces derniers vous permettent de mettre en
scène des personnalités, des artistes notamment, qui ont réellement existé. C’est
un hommage que vous leur rendez ?
J’habite
l’Ardèche méridionale, près d’Alba la Romaine. J’ai connu certains des artistes
qui avaient investi ce village à partir des années 50. Les souvenirs de Paul ont
été l’occasion d’évoquer mon amitié pour un vieux peintre hollandais et cette
inimaginable rencontre entre un monde rural, encore très replié sur lui-même,
et un milieu artistique, cosmopolite, exubérant et majoritairement bohème. Bien
avant la vague soixante-huitarde et touristique que l’Ardèche a connue, un
évènement qui a durablement marqué la population locale. Cette évocation, à la fois hommage et témoignage personnel, s’accordait parfaitement avec le fil et l’intrigue du roman. Ma petite contribution à la préservation de la mémoire d'un lieu.
C’est en
effet une époque d’après-guerre avec ses insouciances, sa jeunesse, sa créativité
qui défile dans votre roman. Je pense aussi à l’évocation d’une enfance
oranaise, à ses marchés, à ses salles de cinéma… Votre roman est-il vraiment fictionnel ?
L’amante immobile reste une fiction. Ses personnages le sont moins...disons qu'ils ne me sont pas totalement étrangers. Par contre, l’immeuble de Paul se dresse bien sur les
quais de Saône, la cantatrice comme tous les artistes et les personnes évoqués ont existé. Les tableaux qui sont décrits sont réels, même la toile
peinte sur ses deux faces ! Ces peintures ont été dispersées ; leurs propriétaires,
anciens ou actuels, les reconnaîtront peut-être. Finalement, cette histoire je devais l'écrire et elle me paraît encore plus troublante...
La psychologie des
personnages
Les relations entre les
personnages, principaux ou secondaires, du roman « sonnent » avec
justesse. On imagine qu’ils pourraient vous être familiers. Clara, la jeune
femme au centre de l’intrigue, vous la connaissez ?
Le
personnage de Clara est totalement imaginaire. C’est une jeune femme comme il
en existe tant : joyeuse, joueuse, rêveuse et insolente parfois. Sa relation avec Paul, un homme âgé et réfléchi, était intéressante à développer au fil des pages. Une curiosité et une admiration de sa part et pourtant l'envie de le bousculer dans ses certitudes. De le provoquer, par jeu, comme le font les adolescents. Des confrontations sournoises pour se faire les dents et s'affirmer comme adulte. Une relation qui devient également ambiguë... C’est
cette insouciante jeunesse, bourdonnante et piquante, qui va tout
faire déraper. J’ai vraiment eu du plaisir à donner vie à Clara et même, qu’elle
m’échappe un peu ! Ecrire, c'est accepter le risque d'être parfois dépassé !
On suit
avec anxiété les mésaventures de Clara, ses questionnements et ses confusions mais on
s’amuse aussi de situations cocasses et des pensées incongrues des autres personnages.
En fin de compte, on se promène dans les espaces ouverts par le roman, comme on
s’introduit dans les pensées et les doutes de ses acteurs. C’était votre parti pris
de départ ?
Il
s’est naturellement imposé à moi pour affiner l’angle de vue du lecteur. Dans
les confrontations entre mes personnages, j’ai en quelque sorte multiplié les « je ».
Pour que s’exprime le ressenti de chacun d'eux, son interprétation de la situation
vécue, ses solutions pour s’en soustraire etc. J’ai souhaité que le lecteur puisse
s’insinuer dans la réflexion des protagonistes, s’interroger aussi et
peut-être même s’identifier. S’amuser
quelquefois de pensées loufoques ou inavouables et même parfois s’inquiéter. Certains diront que L’amante immobile est un roman
psychologique. Pour moi, c'est plutôt un roman choral.
Ce faisant
vous entraînez aussi le lecteur dans la méprise ! Par exemple, il
s’interroge sur les intentions réelles de Paul qui est un cinéphile
« perturbé ». Vous nous mettez en garde sur sa passion ?
Paul
s’est volontairement abandonné à la confusion entre réalité et fiction. Il
analyse le réel à travers le prisme de ses références cinématographiques. D’ailleurs, lui-même se voit dans la vie comme un acteur et s’imagine en interprète du film
qui va correspondre à la situation qu’il doit affronter. Clara, sa jeune
voisine, est dans le même registre fictionnel mais elle en est restée aux
contes de son enfance et à ses rêves. Certainement par incompréhension de la vie des adultes. Dès lors le roman pose une question
répétitive : les fictions peuvent-elles élucider le réel ? Chacun trouvera la - ou sa - réponse...
La Nature si présente
Un réel
qui prend avec Paul une dimension lyrique voire mystique. Je pense aux descriptions
de paysages et de lieux qui émaillent le récit et qui sont l’objet de
réflexions et d’apaisement. Vous avez voulu faire passer un message ?
La
Nature est au centre de mes préoccupations. Je voulais simplement rappeler que l’humanité est juste une des
composantes d’un ensemble que nous menaçons de déséquilibre, par ignorance,
négligence ou indifférence. Le personnage de Paul qui s’identifie à son environnement pour s’interroger
sur sa propre existence et sur sa destinée, montre une autre façon d’appréhender
la Nature, donc de se respecter. On le suit qui observe le fleuve ou se ressource dans un parc. Il a de l'attention et de la considération pour le monde. Le ressenti de sa main sur l'écorce des arbres, leur parfum, leur charpente, le rappel de leur origine lointaine ou la description d'une simple feuille nous montrent que tout est voyage, que tout a un sens. Que tout est essence !
Le roman
témoigne de cette nécessité de la nature, bien que l’action principale se joue dans les quartiers anciens de
Lyon, entre ses vieilles pierres qui vous ramènent au socle terrestre…
J’ai
vécu dans cette ville que j'aime, dans les quartiers que je décris. Le roman est imprégné
de ce passé, de la montée du Gourguillon, du souffle du vent du midi, des petits cafés et des ciné-clubs que nous fréquentions, des films tournés à Lyon : L'Horloger de Saint-Paul, L'Armée des ombres etc. Par ses couleurs, ses fleuves et ses perspectives, Lyon est une ville photogénique qui respire le cinéma depuis sa création. Qui murmure aussi aux passants son histoire et ses mystères. Une très belle ville qui m'imprègne et m'accompagne.
J’ai choisi de vivre plus au sud, depuis bien longtemps. Un Sud
qui me rappelle que je n’ai rien oublié.
Ardèche avril 2019
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Michel
ROUVEURE
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